A pied dans Grasse

05/01/2008

- La villa Noailles

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Le jardin de Noailles est le plus important des jardins de Grasse encore existants, même s’il ne peut être visité que quelques après-midi dans l’année. Il est inscrit à l’inventaire des Monuments Historiques.

« En 1908, un hasard heureux m’avait un jour mené à l’Ermitage de Saint François, près de Grasse, une maison patriarcale des champs du XVIIIème siècle. Avec sa cour nymphée, ses cascatelles rustiques, son bosquet de cyprès et de myrtes à flanc de coteau, il était pour moi un des derniers survivants d’une tradition mourante, et la révélation de cette humble beauté, si conforme à sa terre, m’émut à ce point que j’y eusse conçu alors volontiers la résolution de consacrer la fin de ma vie à une tentative de rénovation si, à ce moment, l’occasion m’en eût été offerte. » (Ferdinand Bac, L’Illustration, numéro de Noël 1922).
L’Ermitage St-François en 1922 (aquarelles de Jacques Lambert)
Le portail La cour-nymphée

Lorsqu’en 1947, le Vicomte Charles de Noailles (1891-1981) choisit d’habiter sa bastide grassoise du XVIIIème siècle, il n’en était pas à son premier jardin. À Hyères, il avait construit un jardin de plantes méditerranéennes agencé en terrasses autour de la célèbre villa construite en 1923 par Robert Mallet Stevens, où le jeune couple Noailles accueillait Francis Poulenc, Man Ray et Jean Cocteau. Plus tard, à Fontainebleau, il avait recomposé le parc du pavillon Pompadour. Après la seconde guerre mondiale, son jardin de Grasse devint bientôt l’exemple le plus parfait d’un jardin anglais réalisé par un Français. On doit dire cependant que la mère de Charles était anglaise, et que son approche était entièrement anglo-saxonne : longtemps Vice-président de la Royal Horticultural Society, il comptait parmi ses amis Lawrence Johnston, Russell Page et Norah Warre, qui jardinaient sur la Côte d’Azur à la même époque.

La Villa Noailles est un domaine d’environ 3 hectares à l’ouest de Grasse (55 avenue Guy de Maupassant), appelée autrefois l’Ermitage Saint François. Une oliveraie en terrasses de caractère virgilien donne au jardin sa structure. Il est formel près de la maison, moins au-delà. C’est la présence de l’eau qui apporte la vie à l’ensemble du site et unifie ses différentes parties. « La chose la plus importante dans mon jardin est la source de la montagne », disait Charles de Noailles. « Elle apporte l’eau des fontaines, des cascades, des ruisseaux et des bassins. Il y a des jardins que l’on dit parfumés. Je dirais que celui-là chante ».

Passée une cour pavée et un nymphée du XVIIIème siècle, on longe une file de petites fontaines sous un dais de rosiers de Banks. L’itinéraire est jalonné de plantations subtiles, de scènes où les réminiscences anglaises et italiennes jouent un rôle important : terrasse et bassin aménagés par l’architecte Emilio Terry, entourés de buis sculptés, allée couverte d’arbres de Judée palissés où, sur les conseils du paysagiste anglais Russell Page, un arbre sur cinq fleurit en blanc, fronton d’ifs taillés, jardin de pivoines arbustives fermé par une fontaine à colonne, bordures herbacées sur quatre niveaux, parterre en camaïeu serti de haies taillées, clairière de magnolias et de cerisiers du Japon irriguée par d’étroits canaux de pierre et complantée de narcisses, d’anémones et de fritillaires… Le jardin recèle bien d’autres trésors, dont une collection de camélias rares (40 variétés, actuellement en état de restauration).

« Un mauvais jardin reflète la richesse de son propriétaire ; un bon, sa personnalité », écrivait le Vicomte. Son jardin est la distillation de tout ce qu’il avait absorbé durant sa longue vie esthétique, mariant son amour des idées et son amour des plantes. Durant une trentaine d’années, jusqu’en 1981, le jardin était ouvert en permanence aux habitants de Grasse, une générosité que Charles de Noailles a mise en pratique toute sa vie de mécène. Après une dangereuse période d’incertitude, le jardin a été repris en main par son petit-fils Charles de la Haye Jousselin. La paysagite américaine Jane Harvey et le jardinier français Bruno Goris déploient leur talent à maintenir et développer la beauté classique, la richesse horticole et la générosité d’esprit qui caractérisait le jardin du Vicomte de Noailles. Aujourd’hui la Villa Noailles est à nouveau ouverte au public, sous certaines conditions. Avec ses lignes douces et ses fontaines musicales, elle est un havre de fraîcheur au fort de l’été et un enchantement au printemps.

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